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Communiqué de presse : politique

Rappel de la position de Gérard Collomb. Sénateur-maire de Lyon, sur la pénalisation de la négation du génocide arménien de 1915

Gérard Collomb

Communiqué le 23/01/2012
Du fait d'un changement de date au Sénat, Gérard Collomb, Sénateur-Maire de Lyon, qui avait prévu initialement de venir assister au débat sur la pénalisation de la négation du génocide arménien de 1915, ne pourra pas s'y rendre en raison d'une cérémonie des vœux au personnel de la Ville de Lyon, le même jour. Il a néanmoins donné son pouvoir et tient à rappeler sa position défendue en mai dernier au Sénat.
Ci-joint son intervention.


Intervention de Gérard Collomb, Sénateur-Maire de Lyon lors de la séance au Sénat du 4 mai 2011 au Sénat.

Jean-Léonce Dupont, président « La parole est à M. Gérard Collomb. »

Gérard Collomb
Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, au moment où notre assemblée entame l'examen de la proposition de loi « tendant à réprimer la contestation de l'existence du génocide arménien », je pense qu'il faut avoir à l'esprit cette maxime latine : summum jus, summa injuria.
J'entends bien les arguments de la commission des lois ainsi que de tous ceux qui, pour repousser cette proposition, invoquent le droit ou la diplomatie.
Le droit, M. le rapporteur l'invoque quand il souligne, au soutien de la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, qu'« à l'inverse du dispositif prévu par la “loi Gayssot” s'agissant de la pénalisation de la négation de la Shoah, il n'existe pas de définition précise, attestée par une convention internationale ou par des décisions de justice revêtues de l'autorité de la chose jugée, des actes constituant le génocide arménien de 1915 et des personnes responsables de son déclenchement ».
J'entends également les arguments diplomatiques de M. Hyest quand, dans les conclusions de son rapport, il souligne « les conséquences diplomatiques inopportunes que susciterait l'adoption de la proposition de loi, tant sur les relations bilatérales franco-turques que sur le timide rapprochement engagé, avec le soutien de la France, entre la Turquie et l'Arménie ».
Je m'inscris toutefois en faux contre ces arguments. Car c'est par ce même type de raisonnement que, historiquement, les Arméniens ont été victimes du premier génocide du XXe siècle, dans le silence assourdissant des Nations. En effet, on évoquait déjà à l'époque l'impératif du droit, l'impératif des traités, l'impératif des relations diplomatiques, pour ne pas parler, pour ne pas agir.
Mais, dans ce silence, une voix s'élevait, solitaire. C'était celle de Jean Jaurès, dénonçant, le 3 novembre 1896, devant les représentants de la nation française, le drame abominable qui était en train de se produire, avec ces mots : « Il faut sauver les Arméniens ! […] Ce qui importe, ce qui est grave, ce n'est pas que la brute humaine se soit déchaînée là-bas ; ce n'est pas qu'elle se soit éveillée. Ce qui est grave, c'est qu'elle ne s'est pas éveillée spontanément ; c'est qu'elle a été excitée, encouragée, nourrie dans ses appétits les plus féroces par un gouvernement régulier avec lequel l'Europe avait échangé plus d'une fois, gravement, sa signature. »
Pourtant, malgré cet avertissement, l'histoire allait se poursuivre et le massacre se transformer, en 1915, en un génocide.
Le caractère génocidaire de ces massacres a été connu assez tôt. Les rapports internationaux rédigés pendant la guerre étaient formels. À l'unisson, les diplomates décrivaient le caractère systématique du programme de suppression des Arméniens. Ce furent, par exemple, les mots que le consul des États-Unis à Alep, Jesse B. Jackson, adressa à son gouvernement : « Je ne pense pas que, dans toute l'histoire du monde, il y ait jamais eu un massacre aussi général et méthodique que celui qui a lieu dans cette région ou qu'un plan plus diabolique soit jamais sorti de l'esprit humain ! ».
De tels témoignages furent confirmés dès cette époque, mais les voix éparses qui s'élevèrent eurent pourtant bien du mal à se faire entendre. Un immense silence avait recouvert le génocide arménien : silence des survivants, tout entiers attachés à se reconstruire, silence d'une douleur que l'on tait, silence d'une plaie cachée que l'on garde pour soi, comme s'il y avait déjà quelque honte à avoir été victime de l'ignominie.
Mes chers collègues, le souvenir de toutes ces victimes doit aujourd'hui nous guider dans notre vote. Certains d'entre nous plaideront en faveur du droit ou de la Constitution. Pour notre part, nous plaidons, aujourd'hui, tout simplement, pour l'humanité !
…/…
M. le président. La parole est à M. Gérard Collomb, pour explication de vote.
M. Gérard Collomb. Comme chacun l'aura vu, le groupe socialiste n'a pas une position unanime sur la présente proposition de loi.
Je constate malgré tout que les esprits progressent, puisque celles et ceux qui se sont opposés à cette proposition de loi se sont tous référés à la reconnaissance du génocide arménien par le Parlement, voilà dix ans. Or, à l'époque, une telle unanimité n'était pas aussi évidente… Je ne doute pas que, dans l'avenir, les faits nous amèneront à prolonger notre réflexion.
À mes yeux, le négationnisme n'est pas une opinion. Mes chers collègues, je le sais pour l'avoir trop vécu dans ma ville, au sein même de notre université, où, au nom de la liberté d'expression, au nom de la liberté de l'historien, on a propagé les pires thèses, on a contesté l'existence des chambres à gaz…
Plusieurs de nos collègues l'ont dit, les choses évoluent, y compris en Turquie. Je suis un ami du peuple turc ; je suis même de ceux qui, sur le plan politique, soutiennent l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, mais je ne crois pas qu'une amitié retrouvée puisse se sceller dans l'ignorance de l'histoire. Celles et ceux, historiens, intellectuels, qui, aujourd'hui en Turquie, mènent le combat pour la reconnaissance d'un triste passé mènent aussi le combat pour l'avenir. C'est après que le peuple allemand eut pleinement reconnu les horreurs commises par ses dirigeants à l'époque du nazisme que la réconciliation entre la France et l'Allemagne a été possible.
Certes, aujourd'hui encore, un certain nombre de personnes, à l'instar de Hrant Dink, paient de leur vie le fait de porter un tel message, mais je suis persuadé que le mouvement est désormais irrésistible et que, demain, plus personne, nulle part, ne niera le génocide arménien.


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